Affût flottant en Brenne

Textes et photographies : Fabrice et Laurent Desage

Retour

31 Mars 2008. La nuit a été longue. Je m’en doutais. La nuit précédent la première séance d’affut flottant, pas moyen de dormir…
Lever à 4 h30, et c’est parti pour 2 heures de route en voiture. Il pleut, c’est presque une habitude. Je savais que la météo n’était pas annoncée brillante, mais j’en ai trop marre de rester à la maison alors que l’affût flottant m’attend sur l’étang en Brenne. Je tente donc le coup, on verra bien, et même si la lumière est nulle, qu’importe, je serai en affut flottant…!
Arrivée sur le site, il fait encore nuit. J’enfile rapidement mes waders, et je longe silencieusement la rive. Quelques canards s’envolent. Au bruit d’ailes je reconnais des souchets.
Voila l’affût…il n’a pas souffert des pluies abondantes des derniers semaines, c’est un soulagement. Je glisse sous la bâche, et c’est parti…On y est…
Le jour se lève à peine…à travers la buée du viseur je tente de distinguer les oiseaux présents. Pres de l’île au milieu de l’étang, il y a des fuligules, des canards chipeaux et souchets, des colverts…Mais il semble manquer une espèce, pour laquelle j’étais justement venu…et m…! je vais quand même approcher de l’île, “elles” sont peut être cachées derrière les herbes…
L’ile est loin, il me faut bien 35 minutes en avançant doucement, pour m’approcher des canards. La buée, causée par mes efforts pour avancer a genoux peine à disparaitre de mon viseur. Au milieu de l’étang, le vent souffle assez pour faire tanguer l’affût. Il manquait plus que ça . Pour braquer un sujet sur l’eau, ça devient un défit ! Dès que j’en tiens un, à peine le temps de faire le point que la houle me dévie…ça va être marrant je sens.
En jetant un œil vers les canards que j’approche, je reprends le moral…”elles” sont la…les NETTES ROUSSES !!!
Que j’aime ce canard, magnifique dans sa livrée noir, brun et blanc, rehaussée de cette tête presque trop grosse pour son corps, finissant sur un beau bec rose vif. Et que dire de cet œil rouge…
J’approche du groupe de nettes très lentement. Elles ne semblent pas inquiétées par ce “buisson” inhabituel, armée d’un gros œil qui les fixe…
Pendant que j’avance, d’un mètre toutes les 30 secondes environ, j’aperçois juste devant l’affût un grèbe à cou noir. Le jour est levé, mais la lumière reste pauvre. Tant pis, je le braque, et je tente de le faire en AF AI SERVO…pas moyen, à cause de ce vent, qui m’envoie le point n’importe où dès que mon collimateur “lâche” l’oiseau ! Vite, je passe en AF ONE SHOT, je cadre instantanément le grèbe et déclenche très vite dès que le point est calé…
Un coup d’œil sur l’écran arrière…C’est bon, c’est net, merci le stabilisateur d’images sur le 500, qui, même s’il ne résout pas ces problème liés au vent, aide quand même à améliorer (un peu…) la visée quand la houle s’allie aux rafales…

Grèbe à cou noir, à quelques mètres de l’affût flottant. La Brenne est un des bastions de cette espèce en France.
Canon 40D et télé 500 /4 L IS USM.

Je reprends mon approche de mes chères nettes rousses…
Me voilà enfin à quelques mètres de ces superbes anatidés. Et dire qu’il y a quelques années, cette espèce ne s’observait guère ailleurs qu’en Camargue ou en Dombes…Quel bonheur de les voir ici maintenant, dans la continuité de l’expansion de l’espèce en France.
Il y en a une dizaine, et il y a plus de mâles que de femelles. C’est normal, il est connu chez cette espèce qu’il y a dans la nature plus de mâles que de femelles. Et tant mieux, ils sont tellement beaux ces mâles…
Je tente de me caler et je commence à shooter…même à mitrailler…!
Je gagne quelques mètres encore, je suis à une douzaine de mètres, et elles se foutent royalement de mon affût….La lumière n’est pas top, mais c’est comme ça…On ne fait pas la fine bouche devant les nettes et on s’applique pour que les photos le soient aussi…nettes.

Le vent ne se calme pas, et charrie la toile de l’affut flottant. Les nettes sont toujours là, la tête sous l’aile, ce qui prouve à quel point mon affût ne les intimide guère. Les fuligules milouins se rapprochent des nettes petit à petit. Voilà maintenant une femelle qui vient dormir à moins de 7 mètres de l’affût. Je ne la photographie pas, car sa pose, tête sous l’aile n’est pas très photogénique. D’autant plus qu’à cette distance, elle pourrait entendre le déclencheur, et ça ne vaut pas le coup de prendre le risque de l’inquiéter pour avoir une photo où on ne voit même pas le bec…J’ai bien fait d’attendre. Un mâle vient la rejoindre, et s’arrête à une dizaine de mètres de moi…Lui, par contre, il n’y coupera pas…Je lui envoie 2 images en rafale. (pour augmenter les chances d’en avoir une de bonne, je prends systématiquement 2 photos en rafale, avant que le vent et la houle me déplacent le cadrage… et je garde la mieux cadrée des deux.
Pendant de longues minutes, je suis littéralement entouré par les oiseaux. Les canards, les grèbes, les foulques…C’est indescriptible cette sensation d’être au cœur de la vie sauvage, à sa hauteur, et tout ça avec cette clandestinité pacifique et admirative…
Les rayons du soleil tentent de se frayer un chemin à travers les nuages noirs. Mes sujets s’éclaircissent en même temps. C’est le moment que choisit un grèbe a cou noir pour s’approcher de l’affût. Il est à moins de 10 mètres. Il faut faire vite avant qu’il plonge…L’autofocus très rapide est un facteur déterminant dans ce genre de situations. Dans la précipitation, je ne prends pas le temps de décentrer mon sujet pour la première image. Il plonge. Il n’y en aura pas de deuxième… l’affût flottant apporte le confort de pouvoir se placer comme il faut avec la lumière, (quitte à tourner autour de l’oiseau, tout doucement !) et de se mettre soleil dans le dos.

Mâle de fuligule milouin, à une dizaine de mètres de l’affût.

Grèbe à cou noir s’approchant de l’affût à un peu moins de 10 mètres.
Par luminosité faible, l’espèce apparait très sombre et il faut un temps ensoleillé pour vraiment profiter de ces couleurs or et rubis tranchant sur le noir de la tête…

Je continue ma vadrouille sur l’étang. j’entends des bruits de courses d’élan. Les nettes rousses s’envolent. Je les braque immédiatement, mais comme j’étais branché sur le grèbe, je suis en mode ONE SHOT…pas idéal…Toutes les photos de la rafale sont floues…j’enrage !
Devant moi, une foulque intimide un congénère. La lumière est belle, je déclenche. J’espère une poursuite sur l’eau, et je passe vite en mode AF AI SERVO…Mais le combat n’aura pas lieu…

Foulque intimidant une autre foulque

Nette rousse avant l’envol.

La progression vers le groupe de chipeaux est assez longue. Il faut dire que je me laisse distraire sur le trajet. Entre les combats de foulques, hors de portée et à contre jour, et le milan noir qui me survole et que je ne peux pas viser au dessus l’affût, je ne cesse de m’arrêter ! Bon, cette fois, j’y vais, je ne m’arrête plus..!
Mais voilà que dans mon dos, des cris inhabituels retentissent. Je me jette aux ouvertures latérales…Trois gros oiseaux viennent d’atterrir à une cinquantaine de mètres sur ma gauche. “C’est quoi ces trucs…??!!” Je les vise au téléobjectif pour les identifier, et là, surprise, j’identifie immédiatement des Ouettes d’Égypte !!!
Bien sûr, elles n’arrivent pas d’Afrique, soyons sérieux…En fait il existe en Europe des populations férales (populations originaires de captivité, mais dont les échappées ont réussi à se reproduire, jusqu’à développer une souche qui vit en liberté, sans aide de l’homme), comme c’est le cas déjà en France pour la bernache du Canada par exemple.
Je décide finalement d’approcher les ouettes. Les chipeaux attendront.
Elles sont à contre jour, et je ne me sens pas de les contourner, vu l’intérêt ornithologique limité pour cette espèce sur le sol français…
L’approche n’est pas trop difficile, les ouettes me calculent à peine…!
La lumière est médiocre, en léger contre jour, mais j’assure quelques images pour fêter ma 357eme coche en France ! (l’espèce est en catégorie C de la liste des oiseaux de France, donc “cochable” sur le territoire français).

Ouette d’Égypte posée sur un monticule d’herbes rassemblées sur l’eau.

Je reprends ma “route” vers mon groupe de chipeaux, qui fouillent les herbes, avec l’arrière train en l’air, comportement typique des canards de surface. Le soleil est capricieux. Tantôt caché derrière les nuages, tantôt plus généreux…
Voil0 un couple qui sort de la végétation. Le mâle surveille dans la direction de l’affût. je m’arrête. Il recommence à se nourrir. Je recommence à avancer, doucement…
Me voila enfin à bonne distance…je braque le mâle en priorité.
Je le suis dans mon viseur, il se nettoie le plumage. Il est de face, je sens qu’il ne va pas tarder à s’ébrouer…doigt sur le déclencheur…ça y est, maintenant…!!! Rafale 6,5 images par seconde…
C’est bon, j’en tiens une de valable….

Canard chipeau mâle qui s’ébroue. La faible vitesse d’obturation a permis de conserver un flou sur les ailes en mouvement. Le ciel couvert du moment a aussi ses avantages…

Male canard chipeau en plein étirement, révélant les superbes couvertures alaires rousses.

Ce matin, c’était la deuxième journée d’affût flottant de la saison…
Mettez vos waders, on vous emmène sous la bâche de “Cyclope” (nom donné à notre affût flottant) pendant six heures…
11 avril 2008. 4h30. Je pose la main sur le réveil pour couper la sonnerie. Le temps de réaliser que je ne me lève pas pour aller travailler, j’ai déjà enfilé le sous pantalon, le treillis et le pull. Juste le temps de prendre un petit déjeuner, et j’embarque le matériel…C’est parti pour deux heures de routes, sous la bruine, et le brouillard…tout pour plaire ! Je cherche désespérément une étoile dans le ciel…Mais c’est bouché…La météo est encore une fois déprimante.
Je suis à 20 minutes d’arriver, lorsque je devine une légère tendance à l’éclaircie…Faut y croire!
Arrivé sur place, je rejoints mon affût flottant. Je suis assez surpris par le calme apparent sur l’étang. Les oiseaux semblent peu nombreux aujourd’hui… aussitôt installé, je me dirige vers l’île, où les canards se tiennent habituellement . Bien que moins nombreux que la dernière fois, je note la présence de souchets, Chipeaux, Nettes rousses, et Fuligules milouins et morillons…du beaux monde.
Il ne me faut pas moins de 45 minutes pour arriver à bonne distance des canards. le ciel est encore relativement couvert et je travaille à pleine ouverture avec le 500/4. Un mâle de Nette rousse , surpris par cet objet flottant non identifié, sera mon premier sujet. Il tend le coup et s’arrête à environ 20 mètres.

Mâle de Nette rousse, exhibant une grosse tête, montée sur un long cou fin.

Foulque macroule… cette espèce tolère particulièrement bien l’affût flottant.

Je remarque un couple de chipeaux, sur pattes, et je progresse vers eux lentement. Ils sont peu inquiets et me laissent aller au plus près… Je donne priorité au mâle, comme bien souvent avec les canards. Ce machisme s’explique par un plumage toujours plus coloré chez les mâles. La lumière me permet de passer à 200 iso et de fermer un peu le diaphragme pour gagner en profondeur de champ, utile à cette distance, pour conserver la netteté sur tout l’oiseau.

Canard chipeau mâle. A première vue bien terne, le plumage du chipeau prend toute sa subtilité en gros plan, dans le viseur.

Canard chipeau femelle, en fin d’étirement. le miroir typique de l’espèce est bien moins étendu chez la femelle, se limitant à quelques rémiges secondaires internes.

Alors que je suis à quelques mètres du couple de chipeaux, une tête se dresse derrière ces derniers. Une poule d’eau me jette un regard curieux. La profondeur de champ trop réduite ne me permet pas de réunir le chipeau et la poule d’eau sur le même plan de netteté…dommage. Mais j’abandonne un moment les canards, pour m’intéresser au petit rallidé. Elle se déplace sur les touffes d’herbes, s’arrêtant souvent pour observer. C’est le moment que je choisis pour déclencher ma première photo.

La poule d’eau est largement répandue sur tous les points d’eau, mais reste malgré tout relativement discrète.

Je découvre soudain la présence d’un Cygne tuberculé, couché sur un îlot… peut être sur son nid. La végétation ne me permet pas de m’en assurer mais je préfère m’éloigner. Inutile de risquer de se faire charger par ce gros palmipède qui se révèle parfois un peu imprévisible. Un couple de Mouettes rieuses est posé sur l’eau. Je les approche doucement, mais j’ai du mal à les garder dans le viseur. J’ai monté le convertisseur 1.4 sur le 500mm, et le léger vent qui vient de se lever, combiné à une focale de l’ordre de 1120mm (focale numérique) ne me facilite pas les choses. Je suis en AI SERVO et le point change trés facilement. Elles s’envolent à plusieurs reprises sur de courtes distances, et je multiplie les flous de mises au point… Ce vent est une calamité ! Elles ont disparu de ma vue, mais je ne tarde pas à les découvrir posées sur un tas d’herbe en plein milieu de l’étang…J’y vais sereinement. Elles sont en pleine toilette et acceptent très facilement la présence des affûts flottant. J’ai parfois eu des mouettes rieuses posées sur mon affût, qui me laissaient leur toucher les palmes à travers la bâche, sans les inquiéter…
Quelques minutes après, je suis devant elles. Elles sont en plumage nuptial. Je les admire à travers le viseur. Elles me laissent leur tourner autour pour me mettre à bonne lumière, et choisir le flou d’arrière plan. Elles s’envolent régulièrement, puis reviennent se poser, après quelques acrobaties.

Les mouettes se mettent à crier, s’agitent. Ils se passent quelque chose. Elles décollent. Je sais que je ne suis pas la cause de leur départ. D’ailleurs, je ne tarde pas à comprendre la vraie raison de ces tensions soudaines… Un Goéland leucophée vient de se poser à trente mètres de mon affût. Les Mouettes le houspillent, et à chacune de leurs attaques en piquée, le goéland se met en posture de défense, et ouvre le bec pour les intimider.
Le Goéland vient passer à la nage devant mon affût. Il est loin de penser que le buisson à gros œil qui est devant lui abrite un humain.
La lumière est tamisée par une couche de nuages, mais je ne me plains pas. Après avoir fait la route sous la pluie ce matin, c’est presque une aubaine de ne pas avoir vu une goutte de pluie depuis mon arrivée sous l’affût. Le reste de la matinée se passe calmement…et seul un héron viendra conclure cette deuxième séance d’affût.

Le Goéland leucophée, bien que largement inféodé au milieu marin, se rencontre également à l’intérieur des terres. Ici, l’avancement de la mue indique que cet oiseau est un immature de 3ème année civile en plumage de 2eme été.

Je progresse doucement…Le Héron cendré qui vient de se poser en bordure de végétation est sur ses gardes. Il ne lâche pas des yeux l’étrange buisson que je représente. Je m’arrête souvent, parfois pendant plusieurs minutes. Je profite des rares moments où il fixe la surface de l’eau, pour gagner du terrain. J’active le livewiew au dos de mon 40D pour surveiller son comportement, tout en me déplaçant. Mais la houle me rend le dispositif de visée directe peu pratique à utiliser. Le Héron se met à marcher. Je le suis dans sa chasse, l’œil au viseur, le doigt sur le déclencheur. Mais il ne se passe rien. La seul fois où il se décide à frapper sa proie, il me tourne le dos !
Tant pis. la saison ne fait que commencer, et les occasions devraient se représenter plus tard. Je décide de rentrer au bord. La matinée a été plutôt pauvre en espèces traitées, mais il faut savoir passer par ses moments pour pouvoir apprécier vraiment ” les grands jours d’affût flottant” !

Le héron pêche derrière les joncs. Je vois juste sa tête. Il attrape un beau poisson, une perche je pense. Il l’avale difficilement et s’envole.
Cette fois, j’étais prêt, en mode AI SERVO, je déclenche dès le décollage. Je suis étonné qu’il se soit sauvé aussi vite après avoir mangé. On dirait que quelque chose lui a fait peur.
En visionnant mes photos sur l’écran arrière, je comprends. Le Héron cendré s’est fait charger par une Foulque, car il s’était trop approché du nid de celle ci…! Oui , c’est le petit oiseau qui charge le gros !!!
Vu que j’étais concentré sur l’envol du Héron, je n’ai pas vu la Foulque cachée derrière les joncs !

4ème séance d’affût : 27 avril, lever 3 h15 du matin, rendez vous à 4h00 chez le frangin.
On est à l’heure, tu m’étonnes, on a eu du mal à dormir l’un et l’autre en sachant où on partait le lendemain…. L’avifaune de la Brenne nous attend…! Pour ce rendez vous, le ciel de l’aube a enfilé une belle robe bleue ourlée de rose. En arrivant sur place, nous sommes immédiatement saisis par la chorale des oiseaux. L’étang se réveille.
Je longe la bordure de l’étang, jusqu’à la roselière où est caché l’affût flottant. En m’installant, je pose la main sur un corps étranger. C’est une couleuvre à collier, qui siffle pour m’intimider ! l’effet de surprise me fait sursauter, elle se sauve aussitôt. Me voila bien réveillé !!
Départ de la berge. Le frangin se poste au bord de l’étang, et prospecte à la longue vue pour débusquer d’éventuels sujets, qu’il me signalera ensuite à tous moments.
Je glisse vers une grande roselière d’où s’échappe un son inhabituel. Il s’agit d’une stridulation bourdonnante, assez métallique. Je n’y crois pas ! Je reconnais ce bruit, c’est le chant de la Locustelle luscinoïde !! En 3 ans d’affût flottant sur cet étang, c’est la première fois qu’on contacte cette espèce sur ce site.
C’est une espèce nicheuse en Brenne, mais assez peu commune. Migratrice, elle revient en France en Avril. Très liée aux roselières, son observation est souvent très délicate. C’est pas gagné pour la voir !
Je me rends sur le secteur où elle chante. Il faut y aller doucement, pour ne pas effrayer les canards qui longent la roselière. Me voilà enfin en bordure des roseaux. La locustelle chante à tue tête à quelques mètres de moi. Bien entendu, pas moyen de la voir ! pendant une bonne demie heure, je reste là à l’écouter, en surveillant chaque roseau qui bouge. La voir est une vraie gageure. Je vais laisser tomber pour me consacrer à des sujets plus visibles. J’avoue que j’ai cru un moment que j’arriverai à la voir et peut être même à la photographier, mais bon, c’était pas très lucide tout ça… Il faut garder les pieds sur t…OHH !!! LA VOILAAA !!!!! Je la vois, en bordure de la végétation, perchée sur une tige en évidence, à 1 mètre de hauteur.
Je la braque en tremblant comme un débutant…Il faut pas manquer ça…
La voilà dans mon viseur. j’avais déjà préréglé sur la roselière “au cas où,” l’autofocus n’a donc pas à chercher beaucoup. Mode ONE SHOT, 400 iso, c’est bon…les premières photos sont déclenchées à la va-vite, pour gérer l’urgence. La locustelle chante, le bec grand ouvert, et tient en place heureusement. J’ai assuré quelques images, je peux soigner davantage mes cadrages maintenant, et baisser la sensibilité à 320 et 200 ISOS. Je vis un instant de bonheur. Cet oiseau si difficile à observer est là, à 5 mètres dans mon viseur, et ne fait aucun cas de mon affût, tellement il est occupé à marquer son territoire en chantant, il tourne la tête pour faire “porter” son chant et m’offre ainsi de multiples attitudes. Je suis fou, je ne quitte plus l’œil de mon viseur, je déclenche vue par vue et en rafales de 3 images quand la posture est idéale. Je remarque à peine un ragondin qui passe très près de l’affût. Dans mon dos, les fuligules milouins font leur petite vie et je ne les calcule même pas aujourd’hui…!
Moment d’anthologie, qui me permettra de faire une soixantaine d’images de cet oiseau que le ciel m’a déposé devant le viseur…
Voila les photos de cette rencontre.

Locustelle luscinioide. Espèce peu commune, localisée dans les grandes régions humides en France. Identification délicate pour une personne non initiée. Le meilleur critère est la longueur des plumes sous-caudales, typique de cette famille, et le plumage brun non tacheté.
L’oiseau chante le bec constamment grand ouvert, sans les mouvements de bec qu’ont les autres oiseaux en chantant. il tourne la tête de tous les cotés, ce qui fait varier le “volume” , et complique la localisation de l’oiseau au milieu des roseaux.
Très à l’aise dans son milieu, l’oiseau peut adopter des postures très acrobatiques. Le grand écart !
Le mythe est tombé. La locustelle luscinioide a posé pour moi un bon moment, avec parfois de courtes minutes d’absence, avant de revenir sur les tiges devant moi. Le rêve éveille !